De quelle façon votre sexe influence-t-il votre carrière ?

Avez-vous véritablement choisi votre parcours professionnel, ou vos hormones en ont-elles décidé pour vous ? Depuis que les femmes ont conquis le droit de s’approprier leur voie professionnelle, de nombreuses fonctions ont été culturellement et socialement catégorisées comme « féminines » ou « masculines ». Par exemple, le métier de nourrice est encore considéré comme un « travail de femme », tandis que celui de développeur informatique est généralement perçu comme un métier « masculin ».

Malheureusement, ces vieux stéréotypes professionnels demeurent encore très présents aujourd’hui. Les femmes ne représentent en France que 13 % des diplômés universitaires dans les filières STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques). Aux États-Unis, seulement 7 % des nourrices sont des hommes.

Cependant, il semble que ces choix de carrière ne soient pas uniquement dictés par les stéréotypes sociaux et culturels. Des chercheurs avancent une autre hypothèse : nos préférences professionnelles pourraient être davantage influencées par notre biologie que par notre éducation. Intrigué(e) ? Découvrez notre article.

L’influence des hormones sur la carrière

Une étude menée par le département de psychologie de l’université Penn State suggère que notre intérêt pour les métiers tournés vers les objets (plutôt que vers les personnes) pourrait être influencé par nos hormones.

Les chercheurs se sont penchés sur l’intérêt des individus pour des professions présentant des différences notables selon le sexe, notamment dans les domaines scientifiques et techniques. Pour disposer d’un groupe de comparaison fiable, ils ont étudié de jeunes adultes atteints d’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) ainsi que leurs frères et sœurs non atteints.

L’HCS expose les individus à des niveaux élevés d’androgènes, les hormones sexuelles masculines. Les femmes atteintes de cette condition sont génétiquement féminines, élevées comme telles, mais développent souvent des intérêts associés culturellement aux activités masculines.

Le résultat le plus marquant de cette étude révèle que les femmes atteintes d’HCS s’intéressent nettement plus aux objets qu’aux personnes, comparativement à leurs sœurs non atteintes. Dans cette étude, les « objets » incluent tout ce qui relève de la mécanique, des chiffres et des systèmes – en d’autres termes, des carrières en STIM. Autrement dit, les femmes avec HCS sont bien plus enclines à envisager une carrière d’ingénieure que leurs homologues sans HCS, qui préfèrent des métiers impliquant davantage d’interactions humaines, comme l’enseignement ou les services à la clientèle.

Les chercheurs avancent que ces différences apparaissent très tôt dans le développement social d’un individu. Fait notable, ce schéma n’a pas été observé chez les hommes, qui, dans l’ensemble, montrent déjà une nette préférence pour les professions orientées vers les objets.

Cette divergence biologique pourrait donc, selon les chercheurs, expliquer en partie la sous-représentation des femmes dans les filières STIM, au-delà des obstacles sociaux, politiques et culturels qu’elles rencontrent. Ils suggèrent par ailleurs que les métiers STIM mettant en avant les interactions humaines devraient être mieux valorisés pour attirer davantage de femmes.

Et si le conditionnement social n’était pas si déterminant ?

La croyance populaire veut que nos choix de carrière soient largement influencés par le conditionnement social et les normes de genre. Pourtant, cela pourrait ne pas être le cas. Une autre étude, menée conjointement par David Geary (Université du Missouri aux États-Unis) et Gijsbert Stoet (Université d’Essex au Royaume-Uni), publiée dans la revue PLOS ONE, a examiné les différences de genre chez 473 260 adolescents dans le choix de leur orientation professionnelle.

Ces adolescents, issus de 80 pays différents, ont permis aux chercheurs d’observer un rapport de 4 garçons pour 1 fille s’intéressant aux carrières centrées sur les objets (charpentier, ingénieur, mécanicien, etc.), et un rapport de 1 garçon pour 3 filles s’orientant vers des métiers centrés sur les personnes (médecin, enseignant, etc.). Les préférences selon le genre apparaissent donc très tôt.

Face à ces résultats, on pourrait penser que les normes sociales et culturelles restent profondément ancrées et influencent fortement les choix professionnels des jeunes. Pourtant, l’élément le plus surprenant de cette étude est que ces différences de genre dans les préférences professionnelles sont tout aussi présentes dans les pays où l’égalité des sexes est solidement établie – comme dans les pays nordiques.

En d’autres termes, même dans des sociétés où les rôles genrés sont équilibrés et où les stéréotypes du type « métiers d’homme » ou « métiers de femme » sont largement dépassés, les adolescent.e.s continuent à exprimer les mêmes préférences selon leur sexe. Étonnant, non ?

On pourrait penser que ces différences sont liées à des facteurs biologiques et hormonaux, mais les chercheurs avancent une autre explication : la richesse. Les pays nordiques, généralement plus prospères, permettent aux jeunes de choisir une carrière par passion plutôt que par nécessité financière. Quand l’argent n’est pas le facteur décisif, les individus auraient tendance à suivre leurs intérêts personnels – qu’ils soient centrés sur les objets ou sur les personnes.

Naturellement, davantage de recherches seront nécessaires pour tirer des conclusions définitives. Bien que le mouvement en faveur de l’égalité ait fait évoluer les mentalités, le conditionnement social reste influent dans bien des aspects de nos vies.

Ce qu’il faut retenir

Il ne fait aucun doute que les hormones sexuelles jouent un rôle clé dans notre quotidien. Chez les femmes, les niveaux d’œstrogène, de progestérone et de testostérone varient au fil du mois, influençant de nombreux aspects de la vie – de la force physique aux besoins caloriques, en passant par la stabilité émotionnelle.

Chez les hommes, la testostérone domine, orientant une grande partie des décisions. Cette hormone est liée à l’agressivité, mais aussi à la protection, à l’ambition et parfois à des comportements impulsifs.

Cependant, il est important de continuer à étudier ces sujets avec rigueur. Même si les tendances sont claires, il convient de conserver un esprit critique vis-à-vis de ces études tant que des conclusions définitives n’ont pas été établies.

Il existe un risque à attribuer trop rapidement les choix professionnels à des différences hormonales, car cela pourrait décourager certaines femmes à s’engager dans des carrières STIM au lieu de les inciter à suivre leurs envies et leurs ambitions, quelles qu’elles soient.

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