La Saint-Valentin

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On peut mépriser la Saint-Valentin, trouver que c’est une fête inutile, que l’amour se prouve toute l’année et pas un jour par an, qu’un couple n’a pas besoin d’une date spéciale pour se célébrer… Mais même dans le rejet de la Saint-Valentin, il faut mettre les formes.

La Saint-Valentin

Erwan est du genre à se foutre de tout. Ca fait partie de son charme. Depuis deux ans qu’on est ensemble, on n’a jamais fêté la Saint-Valentin. Enfin, pas vraiment. La première année, on a fait l’amour au fond d’une salle de cinéma. Je me tenais à un siège de la dernière rangée tandis qu’il ondulait derrière moi, son sexe dans le mien. Le film projeté était une comédie romantique stupide et la salle était remplie de petits amoureux proprets. On avait voulu désacraliser le truc.

La deuxième année, on s’était fait passer pour des journalistes en plein reportage sur la fête des amoureux. Pendant que je posais des questions aux couples attablées romantiquement dans des bars et restaurants, Erwan faisait semblant de prendre le son d’une main. De l’autre, il me doigtait frénétiquement jusqu’à ce que l’orgasme approche. Et je tentais de garder mon sérieux. On voulait encore une fois se moquer de cette fête. Mais au fond, on y prenait part.

Cette année, quand je lui ai demandé ce qu’on ferait pour dégommer le 14 février, il a soupiré. Et il a dit qu’on avait passé l’âge, qu’il était temps qu’on murisse un peu, qu’on passe à autre chose. Je me sentais humiliée. D’abord parce qu’il me faisait passer pour une adolescente immature, ensuite parce qu’il utilisait cet argument pour me signifier que cette année, on ne ferait rien.

Alors le matin de la Saint-Valentin, pendant qu’il dormait encore, je me suis habillée rapidement et je suis sortie faire un tour. S’il ne voulait pas participer au rituel de désacralisation de la fête des amoureux, c’était son problème. Il n’avait pas à me faire souffrir de son accès soudain à la sagesse. J’allais lui faire payer.

J’ai avalé un sandwich en réfléchissant à un plan qui est venu assez vite. Erwan allait vraiment regretter.

Je me suis rendue dans un grand cinéma, à la première séance de l’après-midi, j’ai sélectionné les films les plus romantiques et j’ai attendu. Quand des couples parfaits venaient faire la queue, j’envoyais mon regard le plus pervers aux mecs et j’attendais la réaction. Certains étaient outrés, d’autres aveugles, d’autres encore rougissaient, appréciaient mais n’osaient pas… J’ai toujours plu aux hommes. On se retourne sur moi dans la rue, on me remarque en soirée, je dégage un truc, je ne sais pas ce que c’est. Mais je plais. Chaque fois que j’ai vraiment voulu un mec, j’ai toujours fini par l’avoir. Ils ne me résistent pas. Alors quand je me mets en chasse, je les rends dingue.

Puis j’ai trouvé mon champion. Il était pas mal, sa copine bien blottie dans ses bras… Mais quand je lui ai envoyé une œillade limpide le décolleté bien large, il m’a renvoyé un sourire pas moins équivoque. Poisson ferré. J’ai acheté une place pour le même film qu’eux et je les ai suivis de façon plus ou moins discrète. Il fallait qu’il me remarque mais qu’elle ignore ma présence.

Il s’est installé au milieu d’une rangée, je me suis mis à côté de lui, en laissant une place libre entre nous pour ne pas éveiller les soupçons. La salle était pas mal remplie. Quand les lumières se sont éteintes, que le film a commencé, je me suis rapprochée discrètement sans que la fille ne me remarque. Elle était toujours blottie, la tête contre son épaule, un peu cruche. Il m’a m’a souri, un sourire sans ambiguïté. J’ai passé ma main sur son jean et j’ai senti immédiatement que ça grossissait là-dessous. Il a ajusté son écharpe sur les genoux pour nous dissimuler, pendant que je le déboutonnais.

Tandis qu’il faisait des petits bisous dans le cou de sa copine, j’ai commencé à le masturber. Il avait un beau sexe. Ni trop gros, ni trop fin, une belle dimension. J’y allais mollo pour qu’on ne se fasse pas remarquer. Il a commencé à tâtonner de mon côté avec son bras, alors je l’ai guidé. Je n’avais pas mis de soutien-gorge, j’ai senti sa surprise jusque dans son sexe, au moment où il a plaqué sa main directement sur mon sein nu. J’ai des gros seins, fermes, qui ont une posture magnifique. J’ai hypnotisé des amants juste en leur mettant mes seins sous le nez.

Le mec les masse bien, avec douceur et ferveur. Je crois qu’il aimerait en avoir plus, mais il sait que s’il prend trop de risque, sa copine va nous griller. Comme toute cette situation commence à m’exciter sérieusement, je guide son bras vers mon pantalon. Il caresse mon sexe par-dessus le tissu. Je le laisse faire un moment en me pinçant les lèvres. C’est meilleur que ce que j’aurais pensé, ce dégommage de Saint-Valentin. Comme sa main cherche à se glisser, je déboutonne mon pantalon et je le laisse faire.

Et voilà qu’on est tous les deux à se masturber mutuellement avec sa copine à côté qui regarde le film béatement. Son majeur va-et-vient maladroitement dans mon vagin, il est trop excité pour s’appliquer. Il caresse en même temps les poils de mon pubis, je crois qu’il essaye de se les figurer. Les mecs sont comme ça, ils aiment visualiser les choses.

Il se contracte, il tente de se maitriser, mais moi je sens bien que son sexe s’est figé et qu’il crache son plaisir dans son caleçon et sur ma main. Il embrasse sa copine dans le cou pour se donner une contenance et je retire ma main que j’essuie dans son écharpe. Il me doit bien ça. Ensuite, je me lève et je quitte la salle. Je me fous du film, je n’ai rien suivi de toutes les façons.

Je m’en vais boire un café dans un grand bar plein de couples qui se regardent dans le blanc des yeux. Je pense à Erwan, tant pis pour lui. Je sirote et j’observe. Je scanne, j’analyse. Et je sors le grand jeu, avec mes yeux de gourmande et mon décolleté flamboyant. Je fais des touches, rien de concluant. La Saint-Valentin, c’est quand même un jour à part, les mecs hésitent. Comme ces pères qui s’obligent à pas battre leur enfant le soir de Noël.

J’en repère un vraiment bien fait de sa personne. Je donne tout ce que j’ai et en moins de cinq minutes il est à moi. Je me lève en exhibant mes formes désirables, quelques hommes que j’ai chauffés avant me regardent avec envie, presque déçus d’en avoir une autre sous la main. Et mon bel amoureux se lève aussi, il me suit vers la porte des toilettes, en laissant sa copine seule à table. Il a dû lui dire qu’il en avait pour une minute, elle a souri et il est parti.

Quand il entre à ma suite dans les toilettes handicapées qui offrent plus de place, j’ai déjà un préservatif dans la main. Le mec du cinéma m’a bien chauffée, je suis prête pour les choses sérieuses. Et puis, on est pressés par le temps. Je déplie la table à langer accrochée au mur et je m’assois dessus, provocante. L’homme s’approche et attrape mon visage. Il m’embrasse fiévreusement pendant que je déboutonne son jean.

Il défait mon pantalon à son tour, l’enlève, retire ma culotte et j’écarte les jambes pour finir de le rendre fou. Il transpire de désir, d’incompréhension, il a du mal à réaliser ce qui lui arrive. Son pénis est prêt à l’emploi. Je le couvre de mon préservatif et je le guide entre mes cuisses. Comme c’est bon, cette sensation d’être remplie…

Il commence doucement, le visage toujours aussi interrogateur. Je l’aide en agrippant ses fesses et en le faisant aller et venir en moi plus rapidement. Il finit par prendre le pli et se met à l’œuvre. Il n’est pas très adroit et son air étonné le rend moins beau, mais c’est quand même très bon. Le goût de l’interdit, le plaisir de faire payer Erwan et de saccager la Saint-Valentin sans son aide…

A ma grande surprise, en pensant à Erwan, l’orgasme monte. Je suis obligé de me tenir aux épaules du type pour pas tomber de ma table à langer. Il était fulgurant celui-là, bon et étrange à la fois. Comme mon amant met plus de temps que prévu, je passe à l’étape supérieure. Je dévoile mes seins d’un coup.

Ma poitrine lui explose au visage. Il reste figé, fasciné. Je prends ses mains et les plaques sur mes mamelons et il jouit quasiment instantanément. Il s’enfonce profondément en moi et déverse son plaisir, le corps tendu par l’extase. Son état de béatitude est flatteur. Je le laisse reprendre ses esprits avant de le repousser doucement. Je me rhabille sans un mot, l’embrasse sur la joue et sors.

Je me promène tout l’après-midi, encore amusée et étonnée de ce que j’ai fait à Erwan. Je suis une rancunière. Quand je m’approche de notre appartement, j’hésite encore à tout lui avouer pour le faire souffrir. Je verrai en fonction de la tête qu’il fera.

Je grimpe les marches et tourne la clé dans la serrure. Quand j’ouvre la porte, je découvre notre salon… changé. Il y a des fleurs partout et une petite table avec un couvert mis pour deux. Un maitre d’hôtel m’accueille avec une coupe de champagne. Erwan est en costume, tout sourire.

— Surprise, mon amour ! Et ce n’est que le début de la soirée. Cette année, je voulais une vraie Saint-Valentin, pas encore une de nos excursions destructrices. Parce que j’ai réalisé que je t’aime et que…

Fin